Pour cette première édition, nous rencontrons Matthieu Tetaud, responsable des affaires européennes, à l’aube de la nouvelle législature du Parlement européen.
➡️ De quelle manière Air France travaille avec la Commission européenne ?
MT : Comme toutes les entreprises avec des enjeux européens importants, nous travaillons en étroite collaboration avec la Commission sur l’ensemble des réglementations et travaux qui sont traités par l’institution et qui touchent à nos métiers et opérations. Nous avons une équipe jointe avec KLM à Bruxelles et nous défendons les intérêts du Groupe Air France-KLM auprès des services de la Commission. Nous essayons d’être un acteur à l’écoute, constructif et force de proposition. Il est aussi important d’informer, les fonctionnaires de l’institution sur les spécificités et contraintes de l’activité des compagnies aériennes. Concrètement, nous participons de manière active aux processus législatifs de la Commission en impliquant nos experts pour défendre au mieux nos intérêts, lorsque la Commission souhaite consulter les entreprises ou à notre propre initiative, sur des enjeux juridiques, financiers, techniques. Nous avons par exemple participé activement à l’élaboration de la règlementation européenne REFUELEU qui impose aux distributeurs de carburants d’incorporer du carburant d’aviation durable à partir de 2025. Nous avons également participé aux négociations sur le ciel unique européen, visant à améliorer les règles de gouvernance et de mesure de performance des services de navigation aériennes.
➡️ Cette nouvelle législature peut-elle faire évoluer les critères de choix quant aux décisions sur les consolidations du marché aérien ?
MT : Ce que nous pouvons dire c’est que la Commission et des états membres affichent un soutien de l’industrie européenne et font la promotion de champions industriels européens. La thématique de la compétitivité de l’industrie et la souveraineté est aussi au cœur des nouvelles préoccupations des pouvoirs publics. Néanmoins, la Commission voit souvent dans la consolidation des marchés, et notamment de l’aérien, un potentiel risque sur le consommateur et une hausse des prix des billets à cause de la diminution de la compétition sur le marché intérieur, sauf à mettre en place des remèdes appropriés. Nous ne partageons pas nécessairement toutes ces analyses et faisons preuve de pédagogie pour montrer l’intérêt des consolidations et nous avons une belle histoire à raconter avec le rachat de KLM par Air France il y a 20 ans, qui a permis l’amélioration de la connectivité internationale de la France et des Pays-Bas, et des options de qualité pour les consommateurs européens.
➡️ Quelles sont les marges de manœuvre pour limiter les distorsions de concurrence entre les pays ?
MT : C’est un vaste sujet qui est au cœur de nos préoccupations. Le but est de s’assurer que sur un même marché, les mêmes règles s’appliquent à tous les acteurs, ou à minima qu’Air France-KLM ne soit pas lésé par rapport à d’autres compagnies européennes ou internationales à cause de règlementations qui ne s’appliquent que localement. Ce level playing field est déjà en partie le cas pour le marché intérieur européen, à l’exception de subventions locales reçues et des optimisations sociales par certains acteurs low-cost. Mais c’est sur le marché intercontinental que les plus fortes distorsions apparaissent. Pour tous ces sujets, nous sommes très actifs auprès de la Commission, du Parlement et du Conseil dans la conception et l’application des nouveaux textes européens, par exemple environnementaux ou sur le règles qui régissent les négociations de droit de trafic aérien entre l’UE et d’autres régions du monde. Il n’y a pas une seule solution miracle mais un ensemble d’actions qui réduisent les possibilités de distorsions et donc de fuites de carbone et de trafic. Il reste encore beaucoup à faire et nous travaillons étroitement avec d’autres compagnies européennes sur ces sujets.